vendredi 15 décembre 2017

Amazonie, au sein du coeur vert planétaire (2/3)

Dimanche 3 déc

Nous commençons notre périple vers la communauté qui réunit les ethnies Bora et Huitoto où nous passerons la nuit. Ces villages ne sont pas sur la rive de l'Amazone mais au nord de Leticia au sein de la forêt primaire à la lisière du Brésil.

Cependant, avant de quitter Leticia nous allons au marché acheter tout ce dont nous allons avoir besoin pour le déjeuner dîner et petit déjeuner du lendemain.
Marine privilégie les producteurs locaux auprès desquels nous allons choisir les fruits (nombreux car Marine veut nous les faire découvrir sous toutes leurs formes et en offrir également à nos hôtes), quelques légumes, des poissons ( 4 sortes dont des pirañas) et de l'amidon de manioc.


Nous remplissons deux grands sacs et en sortant du marché nous prenons un taxi qui nous emmène à une vingtaine de kilomètres de Leticia à l'endroit le plus proche de la communauté qui va nous être présenter . La majorité d'entre eux habitent en village, dans des maisons qui se détériorent rapidement et doivent être recontruites tous les 8 ou 10 ans. Cependant nous n'allons pas passer les 24h à venir avec eux mais avec des membres de leur famille qui habitent plus loin dans la forêt.


Après une petite marche de 10 minutes nous  arrivons à la maloca, grande maison communautaire de la tribu des fils de la coca et du tabac et du manioc doux où certains vivent et où les autres viennent quand ils le souhaitent.


En ce moment, dans la maloca il y a l'ancien et sa femme ainsi que leur petite fille de 16 ans et sa propre fille de 18 mois environ. Il y a également un monsieur qui est de passage qui revient régulièrement mais qui n'est pas forcément apprécié car il dénigre la coca. Cependant, ça ne se fait pas de renvoyer quelqu'un, la maloca est ouverte à tout le monde donc il peut habiter là comme il veut même si sa présence et ses mauvaises paroles entraînent des manifestations hostiles de la part des esprits - un jeune homme va subir une attaque invisible qui lui griffe le dos et une poule qui allait très bien va mourir dans la nuit...si,si).

Dans cette ethnie des "fils de la coca, du tabac et du manioc doux" les hommes préparent et consomment  la coca et les femmes cultivent le potager et tout particulièrement le manioc doux.
Nous déposons toutes les courses à une vieille dame (nous apprendrons ensuite qu'elle est mère de 10 enfants) qui va nous préparer tous les repas et que Marine appelle Mamita. Mamita ne vient qu'à la journée  sinon elle habite dans une maison en bois au village.

Pendant qu'elle s'affaire nous allons visiter le potager : pas vraiment de légumes à part le manioc, mais plutot des arbres fruitiers, des ananas, de la Stevia, et toutes sortent de fruits dont un pour se teindre les cheveux en noir et enfin, surtout, de la coca !


Quand nous revenons, un super repas nous attend. Salade, poisson cuit en papillote dans des feuilles, banane plantin sucrée et galette de manioc ainsi qu'un fabuleux jus de fruit.


Nous mangeons dehors sur une table en bois spécialement construite pour les touristes que Marine amène.  Mais comme les tables ne sont pas des éléments qu'ils utilisent, les proportions ne sont pas vraiment respectées ! Le plateau de la table est très haut, même Isa parait toute petite ;-)


Chez les indigènes,  pas de repas familiaux. La maman fait le repas le matin et chacun pioche quand il en a envie au fil de la journée. Eux mangent très peu de légumes et se nourrissent essentiellement de poisson grillé ou en papillote et de galettes de manioc et de fruits.
Ensuite nous installons nos hamacs moustiquaires dans lesquels nous faisons une petite sieste pour tester la meilleure façon de dormir. Pour être à l'aise il faut s'étendre en diagonale et ainsi le hamac se tend un peu à plat ce qui est beaucoup plus confortable. A l'étage dormiront l'ancien, sa femme et ses petites filles.


 Puis il est temps d'entamer une marche en forêt de 3 heures.
Nous ne pouvons pas vous raconter tout ce qu'on a appris depuis notre lever jusqu'au coucher...c'est phénoménal ! Et là, dans cette forêt primaire (c'est à dire qui n'a jamais été défrichee et exploitée par l'homme) nous verrons et entendrons d'incroyables choses, nous nous ferons expliquer comment et avec quelles plantes ils se soignent, comment ils font des pièges, comment chaque bruit, chaque trace est repéré pour une future exploitation lors des sorties de chasse. Nous entendrons des singes mais n'aurons pas la chance de les voir, juste leurs traces dans les arbres qui s'agitent. Nous éviterons les toiles et les araignées, nous contournerons les serpents qui se confondent avec les branches au sol, nous repérerons les termitieres accrochées aux arbres, découvrirons l'arbre dont tout jeune indigène doit se servir pour fabriquer LE manche de sa machette et comme Marine fait décidément très bien les choses nous aurons même droit à une averse tropicale. C'est bizarre car tout d'abord on sent le vent qui se lève, puis on entend du bruit comme si on s'approchait d'une grosse cascade et puis d'un coup c'est le déluge !


Au retour nous nous changeons. Tout est mouillé par l'humidité ambiante et la sueur, nous faisons une toilette/lingettes. Ici pas de douche juste une rivière où ils font la vaisselle, lavent le linge et se lavent aussi mais nous ne sommes pas tentées. Les rivieres sont propres, non polluées mais l'aspect de l'eau est toujours un peu jaune/marron du fait des alluvions, de la décomposition des feuilles des arbres qui sont principalement des arbres palmes donc huileux. Ainsi, la surface de l'eau peut parfois sembler huileuse, voir irisée comme si elle avait des résidus de gazoil...mais non ce ne sont que les palmes qui font ça. C'est une vie particulière car il y a toujours beaucoup de boue et pas vraiment de possibilité de sécher le linge...


Moitié sèches nous nous reposons 1/2 heure en regardant l'ancien tirer des tiges des lianes ramassées dans la forêt et avec lesquelles il tresse ensuite des paniers.


Nous attendons la nuit pour retourner vers le potager et la forêt  et voir des tarentules car elles ne sortent que la nuit. Les tarentules sont des araignées qui ne tissent pas de toile. Elles vivent dans des trous,  des terriers et à la nuit tombée elles sortent pour chasser en direct leurs proies. Elles n'attaquent pas l'homme sauf si on leur marche dessus...on a intérêt à ne pas oublier sa torche et à regarder où on met les pieds !


Ensuite dîner aux chandelles dehors avec Marine. Soupe de poissons aux légumes excellente puis nous avons l'honneur d'êtres admises au cercle des hommes. Les hommes qui habitent le village un peu plus loin, rejoignent la maloca et ils discutent de ce qui s'est passé dans la journée, s'il y a eu des problèmes et dans ce cas échangent sur les solutions à adopter etc... L'ancien est là pour donner la parole de vie. Ils consomment la coca qui a été préparée dans la journée et le tabac pour avoir le savoir et respecter les règles ancestrales et se connecter avec dieu et un savoir universel.


L'ancien transmet la culture aux plus jeunes et tous ces hommes doivent prendre soin de la communauté, de la nature, des animaux et organiser le lendemain et faire en sorte que le lendemain se passe bien. Par exemple s'il y a chasse le lendemain ils vont parler avec l'esprit protecteur des  animaux. Ils lui demandent l'autorisation pour que l'esprit de la forêt ne cache pas les animaux aux chasseurs. S'ils ne le font pas ils croient que la chasse ne sera pas bonne.


En fait le produit fini qu'ils consomment (coca en poudre mélangée à de la cendre d'une palme particulière) s'appelle Mambé donc on dit qu'ils "mambianent" pendant tout ce temps là. Les femmes ne sont pas présentes mais elles le sont par l'esprit car elles préparent une boisson sucrée que les hommes consomment et de ce fait elles amènent la douceur dans la parole et c'est très très important.

Pour le soir où nous y sommes, on va pouvoir discuter avec l'ancien qui nous explique tout ça mais il parle très doucement et prend son temps.... et Fab fait tout son possible pour ne pas s'endormir ! Marine nous traduit tout c'est hyper intéressant, très complexe dans les rapports hommes/femmes ou hommes/dieux décrits et on essaye à défaut d'adhérer au moins d'entendre avec bienveillance ce qu'ils ont la gentillesse de partager avec nous. Mais il nous faut abréger car ils doivent se retrouver entre vrais "mambianeurs".

Cela fait rire tout le monde car Marine alors qu'elle est femme et étrangère à la communauté aime en prendre quelquefois et cela ne plaît pas à l'ancien !
Même si le manbé est fait à partir de la coca cela ne produit pas du tout les effets de la cocaïne du tout. Il permet d'être en contact avec les dieux. C'est surtout le tabac préparé  en une espèce de crème qu'ils sucent sur un bâton qui fait de l'effet. Si on en prend trop cela fait tourner la tête et constitue une sorte de purge. En petite dose et associée à la coca cela booste un peu, permet de lutter contre la fatigue et donc de s'endormir tard en protégeant les femmes et les enfants des animaux dangereux et des mauvais esprits.

La coca représente la féminité et le tabac la masculinité c'est pour avoir la sagesse de l'une et la force de l'autre qu'ils prennent les deux en même temps.
Nous rejoignons nos hamacs et on s'endort en écoutant les hommes parler....
Mais la nuit il y a du bruit, pleins de bruits divers qui nous réveillent par moments. Coqs, oiseaux, singes ??

Il y aurait encore des dizaines de choses a vous raconter sur cette journée mais les mots et les photos ne suffisent pas...Cette journée a été magique et douce...hormis les hordes de moustiques qui ont tendance à fondre sur nous malgré nos manches et pantalons longs. Vivement le lendemain ...



Vous aussi vous irez en Amazonie ?
Pour joindre Marine c'est simple
http://diversunivers.wixsite.com/francais/

3 commentaires:

Unknown a dit…

Belle histoire. J'avais l'impression de regarder un reportage à la télé

Steph a dit…

comme d'hab on s'y croirait, merci de ce partage :)

Marjorie Loup a dit…

Merci, c'est tellement rare d'entendre parler de voyageurs en Amazonie ! Beau reportage les filles :o)